Ordre moral
La Haute autorité (la Halde) a produit un excellent document de base sur la lutte contre les discriminations. Attention à son utilisation et à la résurgence possible d’une notion d’ordre moral dans ce qu’il y a de pire : la bonne conscience qui ne reconnaîtrait « l’autre » que comme une victime à assister. Victime du racisme, de la discrimination, du libéralisme, de la colonisation ou encore des violences que lui infligerait la société.
Il ne faut pas tomber dans le piège de la chasse aux discriminations qui justifierait toutes les errances du fait que la charge de la preuve est remplacée par des présomptions et donc que l’auteur présumé de l’infraction doit prouver son innocence
Exemple : Au cours d’une braderie de mon association, participant au service d’ordre, je dis à un jeune adulte de descendre de son vélo. Il me traite de sale raciste, ameute les gens et va chercher ses copains pour me faire ma fête ! Qu’arriverait-il s’il portait plainte, serai-je entendu ?
Autre exemple, je veux prendre l’ascenseur de l’immeuble, devant moi une femme voilée et un très jeune homme. L’ascenseur arrive, le jeune homme me dit que je ne peux pas l’emprunter en même temps qu’eux. Qu’arriverait-il si j’insistais et qu’un conflit éclate ?
Il nous faut donc veiller à ne pas donner des idées toutes faites sur le droit à ceux qui pourraient s’en servir dans le mauvais sens et qui en oublieraient le respect de la loi et de son usage !
On peut vouloir bien faire et obtenir l’effet inverse, c'est-à-dire renforcer la xénophobie, le racisme, la discrimination et réveiller des frustrations et des réflexes de défense communautariste. Attention donc au « politiquement correct ! »
Je crois qu’il faut aller plus loin, que l’énoncé des règles, dans la formation et la sensibilisation à la prévention des discriminations. Il faut, également, donner l’occasion de réfléchir au sens. Que les jeunes, et les autres, comprennent bien la portée des connaissances mises à leur disposition avec les aspects positifs et négatifs afin qu’ils sachent s’en servir avec justesse et justice.
Il faut revenir aux sources de la discrimination. Dire, par exemple, qu’elle est minoritaire et que le chômage et la précarité sont une réalité pour tous les citoyens. Une réalité qui accentue la compétition et permet à certains de faire des choix arbitraire en fonction de critères qui sont propres à chacun. A compétence à peu prés égale, par exemple, un tel donnerait la préférence à un membre de sa famille ou à un ami pour un emploi s’il est le recruteur (voir l’exemple des bagagistes de Roissy)
Enfin il faut cesser de se culpabiliser et penser que tous les Français sont racistes, colonialistes, qu’ils pratiquent la discrimination comme un sport national et qu’ils ont honte de leur passé, de leur culture et de leurs valeurs.
Bref, la culpabilité et la honte de soi n’ont jamais renforcé la cohésion sociale et c’est bien là où se situent les vrais questions : Quelle citoyenneté ? Quel modèle d’intégration ? Quel héritage culturel ? Quelles valeurs à partager ? Quels projets communs ? De vraies questions pour restaurer un lien social distendu car comment « faire société » si l’on ne s’apprécie pas entre communautés ?
Francis NERI
13 10 06