De la fabrique de l'ennemi en politique.
De la fabrique de l'ennemi en politique.
Le monde n'a jamais été un océan de paix. Il y a toujours eu sur terre des systèmes et des organisations qui s’attachaient à la fabrique de l’ennemi.
Vladimir Poutine a été fabriqué par l’Occident. Il en est le produit.
L’OTAN a besoin d’ennemis pour sa raison d’être. Il est donc faux d’affirmer que l’Alliance atlantique n’aura été qu’un facteur de paix sur notre continent depuis 1949.
Après la guerre froide, la réalité de la guerre en Ukraine vient démentir tout le discours de l’OTAN.
Voyez plutôt le point 23 de la déclaration commune de l’OTAN signée à Bucarest en juillet 2008 : https://www.nato.int/cps/fr/natolive/official_texts_8443.htm
En annonçant l’intégration de l’Ukraine au sein de l’Alliance Atlantique, et en portant directement atteinte aux intérêts vitaux de la Russie, cernée, endiguée, et frustrée, l’Occident a relancé et fabriqué de toute pièce l’ennemi russe en 2008.
C'est sur le fondement de cette déclaration que la Russie de Vladimir Poutine est devenue agressive : intervention en Géorgie à l'été 2008, au lendemain de cette déclaration de l'OTAN, annexion de la Crimée au Printemps 2014 puis tentative d'invasion de l'Ukraine en février 2022.
Quand on examine les faits, tout s'explique.
Jadis, l'ennemi soviétique avait toutes les qualités d'un « bon » ennemi. Fort de son idéologie communiste, et totalitariste, il apparaissait solide, puissant, menaçant, dangereux, constant et cohérent. Sa disparition, en 1991, a entamé la cohésion de l'Occident et rendu plus vaine sa puissance.
Après son humiliation en Afghanistan, en dehors de son espace légitime d'intervention, l'OTAN avait bien besoin d'un nouvel ennemi à l'est de notre continent.
L'ennemi a toujours été une nécessité pour la classe politique au pouvoir. Il est en effet très utile pour souder une nation, pour construire une coalition, pour asseoir sa puissance et pour occuper le secteur militaro-industriel.
C'est la raison pour laquelle les États, mais aussi les services de renseignements, dont la CIA, les Think tanks stratégiques, des élites, des militaires et d’autres faiseurs d'opinion « fabriquent » consciencieusement de l'ennemi. Ils font l’inventaire de ces ambitions et de ces moyens. Ils le placent sous surveillance. Ils mobilisent des budgets, industrialisent des moyens, définissent des doctrines, développent leur propagande et s’organisent pour tenter de le vaincre.
La fabrique de l’ennemi peut aller jusqu’à entrer en conflit ouvert avec lui.
« En temps de paix, les fils ensevelissent leurs pères ; en temps de guerre, les pères ensevelissent leurs fils », disait Hérodote.
L’Occident décadent a besoin de l’ennemi russe, de l’ennemi chinois, de l’ennemi coréen (du Nord) et de l’ennemi iranien. Cet ennemi peut être un grand voisin (le régime russe), un ennemi planétaire (la Chine), un ennemi absolu, un ennemi conceptuel, un ennemi de circonstance, un ennemi du long terme (l'islamisme).
La fabrique de l’ennemi permet aussi de nourrir l’ogre médiatique et de lui mettre de la matière entre ses dents. De ce point de vue, nos médias sont gâtés. La ligne de front de la guerre en Ukraine est sur le plateau de LCI tous les jours depuis plus de deux ans. Si la paix venait à intervenir demain, la rédaction de cette chaîne de télévision s'effondrerait.
L’ennemi est donc avant toute chose une construction politique. Cette construction permet de mobiliser les nations, de prélever davantage d’impôts, de souder les peuples et de gagner des élections.
Il y a des ennemis que l’on voit. Il y en a d’autres que l’on ne veut pas regarder (l'invasion migratoire massive). Il y a des ennemis bien réels, qui n'ont pas besoin de construction, et d’autres qui se révèlent, au fil de l’histoire et du temps, artificiels.
« Il est plus facile de faire la guerre que la paix » disait Georges Clemenceau.
La France a toujours eu des ennemis, avant de faire la paix avec eux : les anglais et les allemands. Elle a également affronté le régime soviétique durant la guerre froide jusqu’à son implosion en 1991.
Le plus grand ennemi de la paix entre les hommes, c’est l’orgueil. Dans l’Occident, nous n’en manquons pas. En France, l'orgueil politique est tout en haut du podium. C'est lui qui reste la plus grande entrave à la paix. Suivez bien mon raisonnement. Et vous saurez de qui je veux parler.
Après la guerre avec l’ennemi, il y a toujours la paix.
Aujourd’hui, c’est elle qu’il faut gagner. Elle est possible avec la Russie. Il faut la vouloir et mettre l'orgueil au placard pour y parvenir. Vite.
Billet du 16 mars 2024 :