Il faut me pardonner si j'ai un peu abandonné ce blog qui me permet de communiquer avec un nombre sans cesse grandissant d'interlocuteurs amis. C'est que j'ai franchi la méditerranée et me suis installé pour trois long mois à Agadir, au Maroc. Peut être plus, si l'envie m'en prend.
Certains d'entre vous connaissent l'endroit, vous me l'avez dit. Michel y réinvente les papillons, Daniel explore le désert et Eléonore de nouvelles formes de communication. D'autres se retrouvent pour accompagner concrètement le père Delouvrié dans ses projets au bénéfice des enfants défavorisés.
Pour ma part, plus modestement j'y vais pour profiter du soleil, retrouver des amis et écrire un nouveau roman. Ce n'est pas mal comme programme ! Vous en conviendrez j'espère ?
Bon, à première vue pas grand-chose à voir avec le titre de cette chronique et une écologie de l'esprit telle que la définissait G. Bateson. Et pourtant !
Si vous avez lu mon dernier bouquin : « Les chemins de l'avenir » vous avez pu constater à quel point le devenir écologique de Maroc « m'interpelle ». Ses ressources énergétiques, alimentaires, diminuent malgré les efforts considérables que ce pays déploie pour assurer son équilibre, en particulier, estime t-il, par l'accroissement du créneau touristique. Malheureusement, proportionnellement à cela, sa population augmente de manière exponentielle, même si certains parmi les nouvelles générations estiment qu'il faut faire moins d'enfants.
Mais le sujet est encore tabou et, la culture « Fellah », celle qui considère qu'il faut procréer sans cesse et accroître sa famille pour assurer son avenir est toujours aussi vivace.
Etrangement, cela me fait penser aux préconisations de l'église catholique romaine : croissez et multipliez. Allez savoir pourquoi les religions, comme les grands patrons, voire les politiciens, veulent que nous fassions toujours plus d'enfants ?
Revenons à l'écologie de l'esprit et à celle du Maroc. L'écologie, c'est la science des systèmes, la façon dont ils interagissent, se relient, se complètent, s'harmonisent. L'écologiste est un systémicien, un analyste et, si l'on réfléchit un peu, c'est un « croyant ».
Je vous l'ai dit, à Agadir je recherche le soleil, le calme et l'accueil de mes amis européens et marocains. Je loge dans un hôtel luxueux et confortable, au bord de la mer, avec piscine, animation etc. Un saut d'avion et me voilà installé....Je sais, je ne devrais pas échapper à la taxe carbone ! Il y a comme un malaise, honte sur moi !
Et pourtant non, je ne culpabilise pas, et me dis que les quelques milliers d'euros que je laisse sur place seront très utiles ici !
Pourvu que çà dure et que cet endroit, pour moi merveilleux, puisse rester encore longtemps à ma disposition et à celle de tous ceux qui voudront bien s'y insérer.
C'est mal parti à mon avis ! Les bétonneurs semblent avoir décidé de transformer le littoral en une suite ininterrompue de complexes hôteliers et de rivages bétonnés.
Pour un systémicien qui s'intéresse aux comportements observables, il y a ceux qui dans une culture peuvent être sélectionnés comme significatifs et dégagent un corps de règles qui peuvent être retenues comme fil conducteur. Y en a-t-il un dans le projet de développement touristique du littoral marocain ? Où plus exactement cette frénésie de constructions est-elle en harmonie avec le contexte culturel, économique, social, écologique, du Maroc, avec ses attentes et ses besoins actuels comme futurs ?
Je n'ai pas la prétention d'avoir toutes les réponses, ni même le commencement d'une, mais j'ai le sentiment que ce qui se passe ici n'est pas bon pour le Maroc et pour la planète. Trop d'hôtels, trop de commerces, à la fois trop et pas assez de touristes. Cette crise qui n'en finira pas de durer ainsi que les changements climatiques inévitables sont loin de correspondre au plan de développement des infrastructures touristiques qui sont envisagées.
Mes amis marocains devraient penser au drame du bétonnage de la côte d'azur et de l'épouvantable gâchis qu'il a occasionné. Ils devraient s'inquiéter de l'impact écologique que va provoquer cette invasion touristique non régulée : impact sanitaire, en eau, en pollution atmosphérique, sur la faune, la flore, et bien évidement, les habitants dont on bouleverse l'écosystème.
Je suis installé dans un bel hôtel, l'Agadir beach club, en bordure de la plage. Je m'y suis attaché en raison de la qualité de son accueil, de l'ambiance cordiale et familiale qui y règne et de son style de construction qui me rappelle les années intenses où l'on dansait le charleston.
Je constate, hélas, que chaque année, de nouveaux hôtels se construisent aux alentours. Comme les clients se font d'année en année moins nombreux à cause de la crise et de la concurrence acharnée d'autres directions touristiques, le « mien » se vide.
Parviendra t-il à survivre ? Je le pense, si ses dirigeants savent dépasser un comportement qui refuserait de relier les évènements dont l'agent causal est contenu dans un système de développement largement dépassé.
Ils devront adopter une approche « communicationnelle » ou systémique qui intègre cinq dimensions : l'individu, le groupe (ou le réseau), le contexte, le temps, et bien évidemment l'observation (sinon l'observateur).
L'évolution actuelle consiste à ne plus centrer uniquement l'attention sur l'individu, mais aussi sur le réseau social, c'est-à-dire l'individu en relation, et le contexte culturel ainsi qu'environnemental où il évolue, puis caractériser la relation.
Ceux qui résisteront à la crise, au béton et à la régression culturelle seront ceux qui prendront le tournant du « changement » inéluctable des attitudes et des comportements.
Le Maroc plus que certains pays occidentaux devrait y être disposé.
En attendant ceux qui veulent visiter ce qui est, encore, un petit coin de paradis me fassent signe, je leur indiquerai le chemin !