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Le systémicien - Page 457

  • L'avenir de l'humanisme

    « L’individu, correctement instruit, reste libre et pleinement responsable de ses actes dans la croyance de son choix. Les notions de liberté (ce que l'on appelle le "libre arbitre"), de tolérance, d’indépendance, d’ouverture et de curiosité sont de ce fait indissociables de la théorie humaniste classique. L'Humanisme désigne toute pensée qui met au premier plan de ses préoccupations le développement des qualités essentielles de l'être humain. »

    L'humanisme pratique ou moral consiste à s'imposer, vis-à-vis de tout être humain, des devoirs et des interdits éthiques : ne pas tuer, ne pas torturer, ne pas opprimer, ne pas asservir, ne pas violer, ne pas voler, ne pas humilier… Fondé sur le respect et la justice, cet humanisme-là revient donc à respecter les droits fondamentaux de l'être humain.

    En ce début du XXIe siècle l’humanisme moderne perçoit l’homme comme un tout dans un tout et le rappelle à sa responsabilité non seulement envers les autres, mais aussi envers son environnement fait de systèmes étroitement dépendants les uns des autres et en interaction.

    Pourtant pour certains, l’humanisme s’inscrit encore dans une confrontation entre trois pôles divergeant qui se radicalisent dans l’espace public : un pôle conservateur, un pôle libéral, un pôle social.

    Si ce mouvement de tension et de divergences entre les trois pôles s’intensifie nous allons vers des conflits d’intérêt majeurs entre ceux qui voudront conserver leurs acquis et ceux qui voudront s’en emparer.

    Dans cette bataille sans merci, ou l’unité culturelle de l’Europe est oubliée, chacun estime détenir la « vérité » souvent au détriment de la « réalité »  qu’ils subissent en contre coup, celle des extrémismes par exemple qui ont une représentation très particulière de l’humanisme occidental et la démocratie qui va avec.

    Chacun également tente d’instrumentaliser ou de marginaliser l’un des pôles pour tenter de détruire le 3e. Des alliances de circonstances se produisent et le pôle conservateur par exemple est encore et pour longtemps l’enjeu alternativement du pôle libéral ou social.

    Pour le pôle social, le scepticisme  de Montaigne n’est plus au goût du jour, et l’angélisme de ses penseurs ne s’étonne nullement de la nouvelle et effrayante irruption de la bestialité qui relativise le pouvoir de la culture sur les instincts et confirme l’opinion de Stéphan Zweig « que l’instinct élémentaire de destruction ne pouvait pas être extirpé de l’âme humaine ». 

    Cet humanisme exalte le libre-arbitre jusqu'à l'excès. Sur le plan éthique, les valeurs humanistes ainsi déconsidérées déresponsabilisent l'homme et encouragent des pratiques douteuses comme le multiculturalisme, le communautarisme, les revendications ethniques et identitaires.

    Ces approches reposent sur des présupposés progressistes. Elles sont trop souvent prisonnières des cadres de la philosophie de l'histoire, issues du marxisme ou d’une interprétation étroite des  Lumières. L’humanisme s’est toujours distancié de l'angélisme qui caractérise parfois ce type de méthode, dont la subjectivité  est susceptible, de compromettre l'objectivité de l'analyse.

    Nous vivons à nouveau une époque ou la violence, la tyrannie des idéologies menace notre vie même et plus encore notre liberté de penser et notre façon particulière de porter sur les choses et les gens notre vision et notre représentation du sens à y donner dans nos actes qui en découlent.

    Comme par le passé, les fureurs sociales et nationales risquent de détruire le monde sous prétexte de religion. Les protagonistes, une minorité d’idéologues et de fanatiques répondent au crime par le crime

    Au moment où l’intolérance domine, penser, dire ce que l’on pense, faire ce que l’on a pensé, n’est  ce pas cela l’essentiel de l’humanisme à retrouver ? Et pourtant, sommes nous encore en mesure de bénéficier encore longtemps de ces valeurs indispensables et conserver cet espoir  chevillé au corps : celui de voir le monde devenir enfin « humain »

    Il suffit pour cela de pas grand-chose, probablement  que les fameux trois pôles travaillent enfin ensemble sur un projet commun qui ne soit pas  le produit d’un extrême, qu’il soit libéral, conservateur ou social. La réalité est dans la médiation gagnant/ gagnant et dans une communication qui respecte un principe essentiel à nos systèmes sociaux : notre communication humaniste se doit d’être à la fois pédagogique, managériale et thérapeutique.

    En effet, l’homme « dans la minorité de son âme » doit être éduqué, instruit et socialisé, mais aussi soigné, régulé et fermement dirigé et cela aussi longtemps qu’il n’aura pas intégré comme un « réflexe conditionné positif » qu’il n’y aura pas de liberté pour le sujet sans qu’il soit capable de se comporter en être humain c'est-à-dire en responsable.

    Francis NERI

  • Clarification

    Dans les trois champs de la relation interpersonnelle (managériale, pédagogique et thérapeutique) la communication vise à influencer, mobiliser et faire adhérer. C'est-à-dire qu’elle tend à produire un effet sur le « récepteur » permettant la mise en communication et en relation des ressources humaines. Pour y parvenir, elle conjugue deux paramètres : l’information qui traite du verbal, du fond, de la matière et la relation, qui met en œuvre le « non verbal », la forme, la manière. Ce qui pose actuellement problème à la communication, c’est la nature des relations interpersonnelles et surtout la confusion avec l’information qui consiste simplement à transmettre un message. La communication  interpersonnelle[1] permet de changer la situation des acteurs sociaux, leur manière de construire la réalité/vérité pour enfin susciter des attitudes et des comportements différents, bref provoquer le changement au sein des systèmes humains et organisationnels.

    Pourtant, combien de discussions sans fin, voire de conflits, qui souvent expliquent l’échec de nombre de projets sociaux, ont pour origine le fait que nos interlocuteurs répondent à nos propos, ou nos écrits, sans avoir au préalable vérifié le sens que nous leur avons donné ?   

    Sans doute faisons nous tous de même. Aussi, devons nous tenir pour principe que si nous sommes responsables des mots ou des écrits que nous produisons, notre interlocuteur est en devoir d’en maîtriser la réception car c’est lui qui donne sens au mystère de notre langage et à son contenu.

    Trop souvent, nous nous impliquons dans des actions ou des projets dont nous n’avons pas suffisamment clarifié le sens, la finalité, les objectifs. C’est la raison pour laquelle il est bon pour un individu ou un groupe de faire périodiquement un « recadrage » de sens, afin que nos interlocuteurs ne se sentent pas prisonniers d’un engagement de type binaire en « oui » ou en « non » qui viserait à provoquer une docilité ou une adhésion.

    Il n’est évidement pas question de restreindre une liberté d’expression qui se réduit actuellement comme peau de chagrin, mais de mesurer l’impact de la « causalité circulaire » du langage et plus encore de l’écrit, c'est-à-dire de ses effets « rétroactifs ».

    La communication interpersonnelle se situe dans un champ éducatif et socialisant encore trop ignoré et qui laisse place à l’émergence de problèmes complexes de communication dont la perspective causale et linéaire est source de conflits graves.

    Henri Laborit dans son excellent livre : « L’éloge de la Fuite » nous fait savoir que ce genre de situation provoque un stress émotionnel intense dont on ne peut sortir que dans la  lutte, la soumission ou la fuite.

    Pour ma part, lorsque je suis engagé dans une situation de ce type et qu’elle risque de devenir conflictuelle, je tente de faire une analyse descriptive de ce qui se passe et la faire partager sans m’engager dans des explications qui tiendraient au « pourquoi ».

    Par exemple, la question : « pourquoi êtes-vous désagréable avec moi ? » n’apporte rien d’autre que des explications, des justifications, des jugements de valeur qui nous limitent.

    La recherche du  « pourquoi », une spécialité des psychanalystes, m’a toujours semblé inutile et je préfère utiliser le « comment ». Par exemple : « comment faire pour rétablir entre nous une communication mutuellement satisfaisante ? » Ou encore, à quelqu’un qui a besoin d’être accompagné dans son objectif de changement, il ne me semble pas utile de lui demander : « pourquoi il veut changer, mais « comment il va faire pour changer ! »

    Bref, il m’apparaît que l’analyse descriptive de nature objective, et faisant le plus possible abstraction de toute subjectivité, est mieux adaptée pour démêler une situation problème dont la causalité est circulaire car elle permet de poser ou de reposer la question du sens et des « buts à atteindre »

    Tel est pour moi l’objectif d’une clarification des relations et du recadrage des actions.          

    Francis NERI

    Le 23 08 07


    [1] Je distingue quatre formes de communication : personnelle (dialogue avec soi-même), interpersonnelle (dialogue entre deux individus), celle des groupes restreints (dynamique des groupes), et la communication de masse (en particulier celle des médias)

  • La réforme de l’Etat et des Institutions

    Il est devenu banal de discourir, d’écrire, de s’interpeller sur les causes de «  La crise de la société française » et bien évidemment de rechercher les responsables de cet état de choses.

    Ce n’est pas facile, car qui aujourd’hui, individu ou groupe, est encore véritablement responsable de quoi que ce soit ?

    Les citoyens que nous sommes ont très vite compris la manœuvre qui consiste à récriminer seuls ou en groupe contre les institutions, tout en se déchargeant de leurs propres responsabilités.

    Car il ne s’agit pas de s’en prendre à toutes les institutions, bien sûr que non ! Les médecins respecteront le corps médical, les parents d’élèves la famille, les enseignants lutteront vaillamment pour préserver l’idée qu’ils se font de l’Education Nationale.

    Et voilà que s’élève autour de nous le concert des lamentations et des exigences des groupes de pression qui, pour être discordant, n’en est pas moins assourdissant et incompréhensible.

    Les critiques et revendications contre l’institution, quelle soit religieuse, politique, économique, judiciaire, qui se traduisent par des manifestations corporatistes ou identitaires souvent violentes, perturbent, sclérosent et paralysent leur fonctionnement.

    L’existence de chacun de nous ainsi que la qualité et le cadre de notre vie en est profondément et dangereusement modifié, d’autant plus qu’à cette absence d’efficacité s’ajoute la perte de confiance et le scepticisme des citoyens envers l’ensemble social.

    Ceci est particulièrement vécu au sein de nos villes qui pourtant et traditionnellement jouaient, et le devraient encore, un rôle de lieu d’asile, de refuge.

    Il est vrai que nos institutions sont critiquables, puisqu’elles ne parviennent pas, selon nous, à fournir un service rendu à la hauteur de nos investissements sociaux, matériels, affectifs et spirituels.

    Education Nationale, Sécurité Sociale, Retraites, Services de Santé, Police, Justice, Eglises, Monde associatif et autres, sont l’objet de sévères critiques et, à tour de rôle, avec une extrême cohérence, chacun des groupes sociaux concernés en dénonce les dysfonctionnements, négocie, exige ou arrache des avantages et des compensations.

    Or, est ce bien les institutions qu’il faut dénoncer ou les dérives qu’il convient de sanctionner ?

    Ces dérives sont-elles vraiment de leur fait ou plutôt de ceux qui les animent ?

    N’avons nous pas tendance à confondre l’institution avec ceux qui abusent de leurs pouvoirs et en trahissent la mission ?

    L’idéal démocratique est une idée, ce n’est pas un fait accompli et sa pérennité n’est nullement assurée. La démocratie pour fonctionner, perdurer et se transmettre a besoin de l’institution. Elle a besoin aussi d’un ensemble de valeurs et de l’expression spirituelle d’une civilisation qui, pour ce qui nous concerne, s’inscrit dans une éthique, un humanisme judéo-chrétien qui bien qu’il ne demande qu’à s’enrichir, tient à conserver ses racines.

    La démocratie a besoin d’un ensemble de principes, de personnes et de groupes pour l’enseigner, la protéger. Elle n’est pas le fait d’un clan, d’une classe sociale ou d’une nation, mais elle est critique permanente de tout ce qui enferme l’homme dans sa propre production, elle est critique permanente de toute représentation idolâtre présente aujourd’hui dans notre culture de l’image et de la performance.

    La démocratie a besoin d’une « foi critique » mais aussi d’un engagement collectif à modérer ses exigences corporatives ou communautaires et à se retrouver dans l’intérêt commun.

    C’est ce qu’il faut souhaiter à notre nouveau gouvernement :

    Le courage de réformer avec sagesse et détermination.

    La capacité de susciter chez nos concitoyens un sentiment de fraternité qui seul permettra aux uns et aux autres de modérer leurs exigences et de s’effacer devant l’intérêt général en acceptant des réformes sans doute douloureuses, mais urgentes, car trop longtemps différées.

    Francis NERI